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Visite mémorielle et balade culturelle du comité de Clermont-Fd

Publié le 22 avril 2024
Lieu de mémoire - La maison incendiée du 1er Corps Franc d'Auvergne Lieu de mémoire - La maison incendiée du 1er Corps Franc d'Auvergne

Le 10 avril 2024, une quinzaine de membres des comités de Clermont-Fd et de Thiers ont participé à une visite mémorielle en hommage au Premier Corps Franc d’Auvergne à Lespinasse (commune de Pulvérières), prolongée par une promenade culturelle.

 

Pourquoi à Lespinasse ?

L’armée secrète de la Résistance est créée au printemps 1942 par Henri Frenay, chef du mouvement Combat. Au début de l'année 1943, les premiers maquis se constituent et s'installent dans des endroits isolés et discrets.

C'est ainsi qu'en avril 1943, une masure de Lespinasse est louée à un prétendu exploitant forestier du nom de Coulaudon pour y loger ses bûcherons.

Cette maison abritera le Premier Corps Franc d'Auvergne, composé des résistants auvergnats les plus prestigieux, dont Émile Coulaudon (colonel Gaspard) et Robert Huguet (colonel Prince),  qui seront faits Compagnons de la Libération.

Au matin du 1er mars 1944, le site est attaqué par les Allemands. Les cinq résistants présents sont massacrés et les maisons incendiées. Heureusement, à cause de la neige, les autres maquisards n'avaient pas rejoint Lespinasse pour la nuit et ont continué la lutte jusqu'à la Libération, notamment au Mont-Mouchet en juin 1944.

 

Un magnifique texte qui résume tout.

 

Le 24 août 1946, le Magazine Indépendant et Résistant LE MUR d'Auvergne

publie le texte ci-dessous d'Aimé Coulaudon (frère d’Émile).

 

LESPINASSE

Un endroit écarté,

Où d'être homme d'honneur on ait la liberté.

LE MISANTHROPE

C'est un petit village d'Auvergne, reposant depuis des siècles sur la coulée de lave surgie d'un volcan sauvage, maintenant endormi.

C'est un village d'Auvergne, avec ses quatre maisons, naguère couvertes de chaume, poursuivant aujourd'hui leur existence modeste et régulière parmi de vieilles ruines, autres demeures désertées par le paysan lassé de sa misère, et tout à côté des ruines plus récentes, désolant témoignage de la barbarie étrangère.

C'est un pauvre hameau, égaré au seuil des bois, accueillant jusqu'à ses portes basses, l'herbe maigre du chemin, les fougères mélancoliques et les genêts brunis par la sécheresse.

C'est le stationnement immémorial, l'habitat d'élection d'une race antique et fière, du paysan de la terre d'Auvergne, dont le travail éternel et silencieux, se laissa bercer aux plus douces paroles de paix, aux plus réconfortantes promesses de bonheur domestique.

C'est le petit coin où vécurent dans le calme et la sagesse tant de générations laborieuses et honnêtes ; c'est le coin où souffrirent des hommes et des femmes, et d'où s'en allèrent de temps en temps, par les chemins rocailleux sur le chariot du travail, au pas lent des bœufs tranquilles ou d'un cheval fatigué des cercueils de vieillards ou d'enfants.

Là, dans ce petit village auvergnat, le village type d'un de nos plus pauvres cantons de campagne, quelques hommes préférant la lutte sans quartier à la servitude, édifièrent dans leur pensée le plus beau rêve de liberté que puisse engendrer l'imminente menace d'un asservissement universel.

Et dans ce tout petit village, ils trouvèrent une nouvelle famille, paysannes maternelles, dont la discrétion délicate offrait sans questionner, paysans combattants de Verdun, réconciliés avec une jeunesse ardente digne de leurs sacrifices passés.

C'est là, dans ce milieu si calme et si recueilli, que s'élaborèrent les projets les plus téméraires, les desseins les plus hardis, les entreprises les plus follement généreuses.

Là, naquit la Résistance d'Auvergne, sous sa forme méthodique et perfectionnée.

Les mois se succédèrent, les saisons enregistraient de nouvelles séries d'exploits. Le petit village devenait le creuset des initiatives inlassables, le cœur battant aux rythmes des brises printanières et des bourrasques hivernales, d'un vaste mouvement de résistance vigilant et impitoyable à l'envahisseur.

La trahison vint.

Cruellement, l'ennemi se rua sur le hameau et pillant, incendiant, massacrant, inscrivit par sa férocité même, le nom de Lespinasse dans l'Histoire.

Dimanche dernier, en présence des habitants du petit hameau et des villages voisins, devant le corps franc d'Auvergne, fut inaugurée la pierre commémorative qui doit conserver les noms de nos héros tombés pour la plus belle des causes.

Beaucoup de petits enfants, amenés par de jeunes mères dont certaines étaient en deuil, regardaient de tous leurs yeux, pleins de lumière et de naïveté, cette pierre grise dressée sur un sol trempé de sang et de larmes.

Plus tard, dans un monde apaisé, ils se souviendront.

L'héroïque aventure appartiendra au passé. Libérée des contingences banales, elle se sera enrichie de cette exaltation sublime que crée le temps. Et le temps l'aura lentement mais magnifiquement idéalisée.

Pauvres maisons ruinées, pauvres familles douloureuses.

C'est parmi vos larmes et c'est parmi vos pierres qu'a vibré sans défaillance ni désespérance le cœur de la patrie.

 

La balade culturelle qui a complété la visite.

 

Des artistes passionnés ont réalisé de magnifiques sculptures dans la forêt toute proche. Une vingtaine d'œuvres ornent un chemin en sous-bois qui mérite une visite.